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Le cimetière sous-marin dont la NASA veut cacher l’existence

Regardez le ciel, la nuit. Que voyez-vous ? Les étoiles, la lune, peut-être même une planète lointaine, selon le moment de l’année. Et, que pensez-vous de tout ce que vous ne pouvez pas voir ? Difficile de répondre à cela. Votre première réaction serait probablement de nommer les galaxies, les supernovæ, les trous noirs. Pourtant, croyez-le ou non, la plupart de ce que nous ne pouvons pas voir flotte juste en dessous de notre atmosphère. Depuis plus de 60 ans, l’humanité projette toutes sortes d’objets dans l’espace, dont la plupart sont maintenant piégés dans l’orbite de la Terre. Cependant, ces objets ne peuvent pas y rester éternellement. Et quand vient le temps pour eux de se retirer, nous devons nous demander – où les vaisseaux spatiaux vont-ils mourir ?

Des débris spatiaux

Depuis 1957, les pays explorant l’espace font tout exploser sur l’orbite de notre planète, des satellites aux stations spatiales. Beaucoup de ces objets ne sont pas encore revenus sur Terre. À l’heure actuelle, près de 5 000 objets conçus par l’homme passent leurs journées à graviter autour de notre planète. Bien que bon nombre de ces appareils soient toujours opérationnels, d’autres restent en orbite après avoir cessé de fonctionner. Surnommés  » débris spatiaux « , ces objets sont destinés à passer le reste de leur vie à la dérive dans l’atmosphère. Mais pour ceux qui regagnent la Terre, le voyage est difficile. Notre atmosphère est assez dense pour brûler ce qui la traverse, mais pour les objets qui arrivent à passer, on ne sait pas où ils atterriront.

La zone inhabitée

Alors, quand vient le temps de désactiver des satellites, des vaisseaux spatiaux et des stations spatiales qui ont disparu, où vont-ils ? Pour la réponse, vous n’avez pas besoin de chercher plus loin que la Nouvelle-Zélande ; Et même peut-être un peu plus loin.… Juste au large de la côte sud-est de la Nouvelle-Zélande se trouve une étendue d’océan connue sous le nom de zone inhabitée de l’océan Pacifique Sud ou Point Nemo. Bien que la plupart des pays reconnaissent cette région comme telle, de nombreux programmes spatiaux mondiaux la connaissent sous un nom différent : le cimetière de vaisseau spatial.

Le point Nemo

Depuis près de 50 ans, le SPOUA (South Pacific Ocean Uninhabited Areaest) est le dernier refuge des engins spatiaux de toutes sortes, et aujourd’hui, des centaines d’entre eux reposent au fond des océans. Mais de tous les endroits sur Terre, pourquoi celui-ci a-t-il été choisi pour abriter nos déchets spatiaux ? La raison est plutôt logique. Le SPOUA est centré sur les coordonnées 43°34′48″S, 142°43′12″O, aussi connu sous le nom de « Point Nemo ». Nommé d’après le capitaine Nemo du livre 20 000 lieues sous la mer, ce point est aussi le seul pôle océanique inaccessible de la Terre.

Au milieu de nulle part

En d’autres termes, le Point Nemo est le point de l’océan qui est le plus éloigné de toute terre émergée. Située entre l’île Ducie des îles Pitcairn, le Motu Nui des îles de Pâques et l’île Maher au large de l’Antarctique, cette étendue d’eau se trouve à plus de 2.600 kilomètres du littoral le plus proche. En raison de son éloignement, le SPOUA est également reconnu comme l’une des zones océaniques les moins fréquentées au monde. Comme il y avait peu de risques de mettre en danger la vie humaine, il était logique que des débris spatiaux y soient déposés.

Cimetière spatial

Cependant, conduire ces vaisseaux spatiaux de plusieurs tonnes jusqu’à leur lieu de repos final n’est pas vraiment une promenade de santé. Ces objets en orbite sont totalement autonomes, donc, en utilisant leurs réserves de carburant restantes, les pilotes sur Terre doivent les diriger vers le point de retour. Passer à travers l’exosphère et la thermosphère n’est pas un problème, mais une fois qu’ils atteignent la mésosphère, les choses se compliquent. Les gaz y sont incroyablement denses et lorsque l’engin spatial se rapproche de la Terre, la résistance commence à se faire sentir.

Feu d’artifice

Juste avant d’atteindre la surface, la plupart de ces corps commencent à se désintégrer. Même l’énorme station spatiale Mir – qui pesait 143 tonnes au lancement – ne faisait plus que 25 tonnes lorsqu’elle a atteint l’eau. Le résultat final ressemble aux festivités du 14 juillet, avec des tonnes de débris en fusion et de métal incandescent qui pleuvent sur des centaines de kilomètres sur l’océan. C’est à cause de ces retombées massives que le SPOUA couvre aujourd’hui une zone aussi vaste.

Retombées anarchiques

« En raison de la nature de ce phénomène de désintégration, nous devons dégager une zone assez grande pour nous assurer que tous les fragments tomberont dans la zone désignée parce qu’ils ne tomberont pas au même endroit « , explique Holger Krag. Heureusement, les organisations spatiales n’ont pas à s’inquiéter du fait que quelques navires circulant dans ces eaux soient touchés, car un avis de désorbitation est généralement émis bien avant son arrivée. Par conséquent, tout ce qui importe aux pilotes, c’est d’amener l’appareil au bon endroit.

Une célébrité au SPOUA

A côté de Mir, près de 300 autres engins spatiaux reposent dans les eaux du SPOUA. Parmi ces embarcations se trouvent six stations Salyut, le vaisseau cargo russe Progress, le lanceur japonais H-II et l’ATV Jules Verne de l’ESA. Mais aussi impressionnant que soit ce processus, certains se demandent pourquoi nous choisissons de polluer notre océan avec des débris plutôt que de les faire disparaître dans l’espace. En réalité le faire serait beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît.

Solution de facilité

Pour faire exploser un satellite ou une station dans l’espace, il faut une quantité massive de carburant. Même si le vaisseau réussissait à sortir de l’orbite de la planète, rien ne garantit qu’il n’en retrouverait pas le chemin. De plus, il y a très peu d’organisme vivant dans la SPOUA, car son implantation dans le couloir du Pacifique Sud empêche la zone de recevoir les nutriments essentiels. Sans humains, animaux ou plantes en danger, il est difficile de contester la logique derrière ce cimetière fantomatique de vaisseaux spatiaux.

Simulations de dévastation

Pourtant, tous les objets qui pénètrent dans l’atmosphère terrestre ne sont pas les bienvenus, surtout ceux qui menacent de mettre fin à la vie sur Terre telle que nous la connaissons. Mais face à ce problème, il semblerait que les têtes pensantes du monde aient trouvé une solution qui pourrait bien sauver notre planète. Nous connaissons tous la NASA pour le lancement des astronautes et des satellites en orbite. Cela vous surprendrait-il d’apprendre qu’une équipe de leurs scientifiques étudie les simulations de la ville de New York dévastée par la fin du monde ? Ce n’est pas non plus un projet marginal. Ils sont très sérieux.

Éviter l’apocalypse

L’homme à l’origine de cette mission particulière est Lindley Johnson. Vétéran de la Force aérienne depuis 23 ans, il a rejoint les rangs de la NASA en 2003. Depuis, son attention est surtout concentrée sur la fin du monde. Mais ne vous inquiétez pas, Lindley n’est pas fou. Il n’insiste pas sur l’apocalypse, mais l’aborde plutôt d’un point de vue analytique. Lindley est l’officier de défense planétaire de la NASA, donc personne n’est mieux armé que lui pour affronter la fin du monde. Alors que l’humanité est plutôt douée pour se mettre en danger quotidiennement, Lindley ne s’inquiète pas des menaces terrestres. Il s’intéresse plutôt aux débris de l’espace.

La menace des astéroïdes

La plupart des météorites qui descendent sur Terre sont assez petites, voire microscopiques. Cependant, que se passerait-il si un astéroïde, de la taille d’un terrain de football, se dirigeait vers notre planète ? Il y a fort à parier qu’il atterrirait au milieu de l’océan, mais Lindley veut mettre toutes les chances de son côté. C’est pourquoi son équipe de la NASA enquête sur des cas (hypothétiques) d’astéroïdes géants frappant des zones densément urbanisées. Des milliers d’années s’écoulent généralement entre de tels événements catastrophiques, mais Lindley a l’intention d’être prêt à tout moment.

Parer à la menace

D’autre part, la topographie de la Terre prouve à quel point une collision peut être destructrice. La NASA ne souhaite certainement pas que le centre-ville de Manhattan devienne un cratère, mais elle s’intéresse à l’étendue exacte des dégâts. L’équipe de Lindley effectue continuellement des simulations pour avoir une meilleure idée de l’endroit où les astéroïdes sont les plus susceptibles de frapper et des dommages auxquels nous pouvons nous attendre. Dans certains cas, une collision peut être inévitable. Mais la Terre n’est pas totalement sans défense.

Des moyens engagés

Pendant des années, Lindley et ses collègues ont travaillé avec un budget restreint. Heureusement, un audit en 2015 a convaincu le Congrès de l’importance de se consacrer à la défense planétaire. Ils ont immédiatement fait passer le budget annuel de Lindley de 5 à 50 millions de dollars. Avec plus de moyens qu’il ne l’avait jamais imaginé, Lindley a mené sa bataille contre le danger galactique. Son équipe de la NASA a rassemblé un arsenal de données et une technologie de pointe pour tenir à distance les astéroïdes.

Des impacteurs cinétiques

La NASA n’en parle pas trop mais elle a répertorié plus de 2.000 astéroïdes dans notre système solaire capable de détruire un continent entier. Faire exploser une roche aussi imposante pourrait causer trop de dégâts, alors Lindley a d’autres tours dans son sac. La méthode la plus prometteuse pour rediriger un astéroïde est l’utilisation d’impacteurs cinétiques. Ces engins spatiaux sans pilote s’écraseraient sur un astéroïde à grande vitesse, le détournant ainsi de notre planète. Avec tout le respect que l’on doit aux fans d’Armageddon, Lindley ne croit pas qu’atterrir sur un astéroïde serait la solution la plus efficace. La NASA n’a toujours pas abandonné cette idée.

Armageddon

Les astronautes se sont entraînés à l’atterrissage sur astéroïdes, mais personne n’a jamais tenté l’exploit. La NASA prévoit cette opération davantage comme un moyen de prélever des échantillons de minéraux, mais il y a toujours la possibilité qu’en cas d’urgence, ils fassent appel à Michael Bay ! La NASA dispose d’un large éventail de solutions possibles, bien qu’elle soit en train d’accélérer la prévention des astéroïdes de façon plus concrète. Par exemple, ils ont installé des télescopes orbitaux supplémentaires pour surveiller les roches spatiales du système solaire qui pourraient mettre nos vies en danger.

Technique de déflexion

En fin de compte, la capacité de repérer les catastrophes à venir pourrait être le facteur le plus important. La plupart des techniques de déflexion nécessitent des mois ou des années de mobilisation, alors un délai de quelques jours ne sera pas suffisant La bonne nouvelle est que la NASA n’est pas seule dans ce combat. L’équipe de Lindley a organisé des exercices avec la FEMA (Federal Emergency Management Agency) pour se préparer aux dommages collatéraux causés par une collision. « C’est un excellent moyen pour nous d’apprendre à travailler ensemble et répondre aux besoins des uns et des autres « , explique Lindley.

Paré pour l’apocalypse

En 2019, Lindley a également organisé une conférence avec l’Agence spatiale européenne et l’International Asteroid Warning Network. En unissant leurs efforts, ils auront l’œil sur le ciel partout aux quatre coins de la planète. Bien qu’il semble peu probable que nous ayons à faire face à une apocalypse imminente, la civilisation est mieux préparée que jamais. Cette nouvelle ne pourra que décevoir les annonciateurs de l’apocalypse, qui ont sûrement fait le plein de leurs bunkers pour rien.

D’énormes responsabilités

Malgré les conséquences de son travail sur la vie ou la mort, Lindley dit qu’il dort très bien la nuit. C’est juste un autre jour de travail à la NASA. En outre, Lindley peut citer de nombreux collègues qui ont des responsabilités qui pourraient être encore plus délicates que les siennes. Lindley n’aurait probablement pas supporté le travail de George Aldrich. Quand le professeur de George lui a dit de « viser les étoiles » lorsqu’il était enfant, il a plutôt suivi ce conseil à la lettre. Plusieurs décennies plus tard, il occupe un poste qu’il n’aurait jamais espéré atteindre à la NASA.

Un pompier qui a du nez

Ayant grandi au Nouveau-Mexique, George a vu son père gravir les échelons de la Marine et se joindre aux convoités Blue Angels. Il a toujours rêvé d’atteindre de tels sommets, et il a donc cherché un emploi héroïque dès qu’il a terminé ses études secondaires. George a commencé au bas de l’échelle. Il s’est porté volontaire pour le service d’incendie local, et son expérience récente en chimie et en mathématiques a piqué l’intérêt du chef. Il a engagé George pour une tâche spéciale au sein de la caserne.

Un odorat exceptionnel

Bien qu’il n’ait pas éteint beaucoup de feux, George s’est démarqué sur le tableau d’odeur du service. En exerçant son odorat, il pouvait détecter des problèmes tels que les fuites de gaz. Rapidement, il réalisa qu’il était destiné à de plus grandes choses. En 1974, son chef recommande à George d’évoluer. La NASA était bien implantée dans la région, alors George se dit qu’il pourrait peut-être y trouver un poste. Après la catastrophe d’Apollo 1 – où une défaillance technique à bord d’une navette a tué les trois membres d’équipage à bord – la NASA prend au sérieux la sécurité. Elle avait besoin de personnel capable de prévenir des catastrophes que la plupart des gens ne verraient jamais venir.

Un nasalnaute

Après avoir postulé, George dut passer un examen poussé pour voir s’il avait l’étoffe pour le poste. Quelques heures plus tard, il pose son crayon et rentre chez lui, attendant un coup de fil qui concrétisera ou brisera ses rêves. Puis la bonne nouvelle est arrivée : La NASA a demandé à George de se présenter immédiatement au White Sands Test Facility, où il commencerait son nouveau travail de spécialiste en chimie. Mais qu’est-ce que cela signifiait exactement ? Si vous interrogiez George sur son travail, il se décrirait comme un « Nasalnaute » ou un « sniffer en chef ». C’est parce que ses vraies responsabilités se résument à sentir tout ce que la NASA envoie dans l’espace.

Un poste qui a du sens

Aussi étrange que cela puisse paraître, le rôle de George a du sens. Les astronautes vont dans l’espace pour de longues périodes, coincés dans des espaces restreints, respirant de l’air recyclé. La dernière chose que le service voudrait, c’est que des émanations ou des substances nocives se déplacent et se répandent dans la navette. C’est précisément là que George et son équipe interviennent. Ils inspectent personnellement l’odeur de chaque cargaison et de chaque équipement pour s’assurer que tout est en bon état. Bien sûr, personne n’a autant de flair que George.

Record de sniffs

Il détient le record de la NASA du plus grand nombre de sniffs officiels, son record approchant le millier. Naturellement, le système de George est plus nuancé que le simple fait de juger une odeur comme bonne ou mauvaise. Le contrôleur d’odeurs examine chaque objet à l’aveugle, de sorte que leurs perceptions quotidiennes sur les objets ne perturbent pas leur jugement. De là, les renifleurs classent tout sur une échelle de 0 à 4. Si quelque chose obtient un score supérieur à 2,5, ils recommandent de ne pas l’embarquer. Entre deux tests, George réajuste simplement ses narines en sentant le dos de sa propre main. Et son travail a probablement sauvé des vies.

Détecter les risques

Une mission spatiale avec des humains implique tellement de réactions chimiques complexes que la NASA ne peut risquer que des matières toxiques s’infiltrent à bord. Les astronautes eux-mêmes peuvent ne pas être en mesure de le détecter. Ils ont alors besoin d’un nez expert pour le faire à leur place. George a découvert que les pellicules d’appareils photo, par exemple, peuvent être étonnamment toxiques. Par ailleurs, le velcro peut empester une navette spatiale entière. George a une fois déterminé que bien que les sangles de velcro séparées n’ont pas de réelle odeur, ensemble elles peuvent produire une odeur insupportable. Mais toutes les odeurs ne peuvent pas être éliminées.

Un parcours sans faute

George dit qu’en fin de compte, les humains puent vraiment, et que la NASA ne peut pas y faire grand-chose. À cause de fonctions de base comme transpirer et aller aux toilettes, les astronautes ont besoin d’apprendre à vivre avec certaines odeurs. Après 44 ans, George est toujours aussi performant. Il affirme qu’il a seulement manqué deux contrôles (pour cause de maladie) au cours de toute sa carrière. On pourrait vraiment penser qu’il a écrit le livre sur les tests d’odeurs. Mais il a certainement aussi senti le livre.