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La raison surprenante pour laquelle personne n’a posé un pied sur cette île hawaïenne depuis plus de 150 ans

L’archipel d’Hawaï évoque immanquablement des paysages sublimes composés de plages de sable fin, de forêts tropicaux et de volcans spectaculaires. Si vous vous attardez – et à raison – jusqu’au coucher du soleil, vous pourrez apercevoir un bout de terre montagneux se profiler à l’horizon, à environ 27 kilomètres de côtes de Kauai. Il s’agit de Niihau, un îlot nimbé de mystère, car depuis 150 ans, il est totalement fermé au monde extérieur. En raison de son isolement, il a suscité l’intérêt de nombreux voyageurs et de célébrités qui aspirent à être parmi les rares personnes à fouler celle qu’on appelle désormais « L’Île Interdite ». Son histoire est aussi fascinante que l’endroit lui-même, elle est en effet le dernier bastion de la culture hawaïenne.

Une famille écossaise

L’histoire de Niihau commence avec celle d’Elizabeth McHutcheson, dite « Eliza », née en Écosse en 1800 d’une famille de marchands. En 1824, elle a épousé Francis Sinclair à Glasgow, un capitaine de navire chevronné. Peu après la naissance de leur sixième enfant, tout le clan est parti s’installer dans une ferme à Pigeon Bay, en Nouvelle-Zélande.

Un drame familial

Cette vie rangée et tranquille a basculé en 1846. Francis Sinclair était un marin dans le sang et il se languissait de l’océan. Cinq ans après l’arrivée de la famille en Nouvelle-Zélande, il embarqua avec son fils à bord de son navire, le Jessie Miller. Ils transportaient une cargaison de marchandises qu’ils s’apprêtaient à revendre ailleurs. Un vent violent a brutalement mit fin à leur périple, et le bateau a sombré.

Une veuve courageuse

Eliza s’est retrouvée veuve et privée à vie de l’un de ses fils à seulement 46 ans. Et comme toute la cargaison avait disparu en mer, elle ne disposait plus d’aucun revenu. Elle était seule dans un pays inconnu, avec ses cinq enfants. Courageusement, l’intrépide Écossaise continua à exploiter la ferme jusqu’à la rendre aussi prospère qu’autrefois.

Un départ inéluctable

Elle a même réussi à marier tous ses enfants. Toutefois, le clan Sinclair s’était tellement agrandi qu’ils avaient besoin de plus de terres pour subvenir aux besoins de tous. Et c’est là qu’Eliza a compris qu’il était temps de partir. Ils avaient un bateau nommé Bessie. Peut-être pourrait-il les mener dans vers une terre fertile, quelque part dans le nord-ouest du Pacifique ?

Embarquement pour le Canada

En 1863, toute la famille Sinclair est montée à bord du Bessie et a appareillé en direction de la Colombie-Britannique. Eliza espérait y acquérir un grand terrain et y établir une ferme. Mais lorsqu’ils sont arrivés à Vancouver cette année-là, ils ont rapidement déchanté. La terre était rude et stérile, et la région semblait encore si peu développée. Eliza songeait sérieusement à mettre le cap sur la Californie quand elle entendit parler des îles Sandwich.

L’achat de Niihau

Eliza a alors mis les voiles vers les îles Sandwich, connues aujourd’hui sous le nom des îles Hawaï. Accompagnée des 13 autres Sinclair, l’infatigable matriarche de 63 ans a rencontré le roi Kamehameha V, qui régnait sur l’archipel, et lui a proposé d’acheter Niihau. En 1884, la petite île lui fut cédée pour 10 000 dollars en or. Nul ne sut jamais ce qui avait poussé le roi Kamehameha V à accepter son offre.

La promesse au roi

Le souverain a mis toutefois une seule condition à la vente, qui allait sceller le destin de l’île. Il dit aux Sinclair : « Niihau est à vous. Mais un jour viendra peut-être où les Hawaïens ne seront plus aussi forts à Hawaï qu’aujourd’hui. Quand ce jour viendra, faites ce que vous pouvez pour les aider». Les Sinclair ont tenu parole.

Une petite communauté paisible

Les Sinclair n’ont pas eu pas du mal à s’adapter à leur nouvelle vie. Mieux, ils ont été rapidement adoptés par la population locale, qui voyait en Eliza une véritable princesse. Ils construisirent des maisons pour les habitants de l’île, et les ont encouragés à aller à l’église tous les dimanches – dans la continuité des missionnaires qui ont évangélisé Hawaï des décennies auparavant.

Une culture préservée

En 1893, la monarchie hawaïenne a pris fin avec l’annexion de l’archipel par les États-Unis. Au fur et à mesure qu’Hawaï devenait un État à part entier, la culture et les traditions locales ont été abandonnées – sauf à Niihau. En tant que propriété privée, l’île a pu échapper à l’influence américaine et préserver ainsi son authenticité.

Le choix de l’isolement

En 1930, Niihau fit une annonce surprenante : elle décidait de se couper définitivement du monde extérieur. Si la raison invoquée était de protéger les Niihauans contre des maladies telles que la polio et la rougeole, elle visait aussi à préserver la culture indigène hawaïenne – appelée aussi « kahiki ». Aujourd’hui, Niihau es le seul endroit au monde où l’hawaïen est la langue dominante.

Des habitants(quand même) ouverts au monde

Cela ne veut pas dire que les Niihauans ignorent tout de la vie sur le continent. En fait, beaucoup d’entre eux parlent plusieurs langues et partagent leur temps entre l’île interdite et Kauai, où il y a plus de possibilités d’emploi. Il faut noter que l’économie de Niihau repose essentiellement sur la vente du Niiahuen, un précieux petit coquillage utilisé pour confectionner les leis – les colliers traditionnels hawaïens.

Un mode de vie bien organisé

Aujourd’hui, Niihau n’a toujours pas de route, d’eau courante ni d’électricité. Pour y remédier, les habitants collectent de l’eau de pluie et disposent chacun de panneaux solaires. Les livraisons de provisions et de marchandises sont effectuées chaque semaine par barge depuis Kauai. L’alcool, le tabac et les armes à feu sont interdits sur l’île.

Un emplacement militaire stratégique

Paradoxalement, malgré l’interdiction des armes à feu, l’île constitue une position stratégique pour l’armée américaine. Celle-ci a même mis sur pied une base d’opérations de défense, qui emploie de nombreux Niihauans. Être dans l’armée pourrait donc être votre sésame le plus sûr pour y accéder un jour. On raconte même que Mick Jagger a été prié de faire demi-tour lorsqu’il a voulu la visiter en hélicoptère.